Je viens d’apprendre que Vincent est parti.
Quand on part à cet âge ce n’est pas normal : c’est ce que je voudrais dire en premier.
Ensuite, je voudrais dire qui était Vincent pour moi, dans ma vie, quand nous étions enfants.
Vincent, c’était d’abord le fils de mon parrain Alain, avec sa femme Colette. C’était aussi le frère de Benoît et de Claire.
Vincent, c’est celui avec qui j’aurais éternellement ces deux grands souvenirs, pour ne citer que ceux-là.
Ce sont deux grands souvenirs dont je parle, parfois, encore : c’est pour dire que, Vincent, c'était quelqu'un d'important, et qu'il faisait parti de ces copains d’enfance avec lequel on vit les plus grandes expériences, de celles dont on se rappelle pour la vie.
En bref, bien entendu, mon souvenir avec lui, ne se résume pas qu'à ces deux souvenirs-là... Cependant, ce sont ceux-là qui offrent une idée de la relation géniale qui me relie encore à lui aujourd'hui, malgré des années de distances.
Tout d’abord, l’histoire du vélo, de la planche à roulette, et du trottoir, dans l’angle à 90° que forme la rencontre du "chemin des tuileries" et de "l’impasse des Marots". J'étais, moi, sur le vélo, Vincent, sur la planche à roulette, les deux rattachés par une corde de 4 ou 5 m de long… et puis il y a eu le trottoir... à un moment...
Ai-je besoin d’en dire plus, pour faire comprendre l’épisode… ?
Moi, lancé à « 200 km/h » sur mon vélo d’enfant de 10 ou 12 ans, et Vincent derrière sur la planche à roulette à 5 mètres derrière de moi. Cela faisait de nous comme un attelage... supersonique...
En partant de la ligne droite du chemin des Tuileries, moi sur le vélo, je voudrais dire que je prévoyais, naturellement, de négocier, très doctement, le virage à 90° à droite, qui nous ferait rentrer « avec une vraie finesse » dans l’impasse des Marots : j’avais, là, malheureusement oublié qu’un malheureux trottoir, du fait de l'inertie de l'attelage, pourrait couper la route de la planche à roulette derrière moi, et avec Vincent dessus… cela s’est finalement effctivement avéré être un obstacle certain à la course de la planche à roulette, avec Vincent dessus…
Naturellement Vincent était ressorti très douloureux de sa rencontre avec le trottoir : après discussion avec Lui, je crois que nous étions ressortis tous deux d’accord, pour dire qu’il valait mieux éviter de parler de cet épisode à nos parents respectifs.
Ensuite, c’est le moment où conjointement, nous avions décidé de faire de la cheminée du 22, chemin des tuileries, un four de fonderie : ça devait être en 1988 ou 1989.
L’énorme « plus » du 22, chemin des tuileries, une maison que ma famille avait investie en 1987, c’était sa cheminée. Elle se situait à l’étage, et était alors initialement ornée de traverses goudronnées, typiques de la ligne de chemin de fer quasi-attenante.
Il faut rappeler que si les traverses de chemin de fer sont goudronnées, c’est pour éviter qu’elles ne brûlent : elles ne font, « heureusement », que se consumer très très lentement, le cas échéant, et avec une odeur de goudron très caractéristique.
Ce jour-là nous avions décidé, avec Vincent « d’Allumer le Feu » comme dans la chanson de Johnny… mais aussi, et surtout, sur un mode industriel, avec chacun sa tâche.
Avec l’aide d’une brouette, nous pouvions, avec une vraie efficacité, alimenter la flamme dans la cheminée… Chacun avait donc sa tâche : Vincent était à l’approvisionnement en bois depuis le hangar attenant. Vincent prenait donc les bûches une à une pour les amener devant la porte d’entrée de la maison à l’aide de la brouette où il déversait la cargaison. Moi, j’étais chargé d’acheminer les bûches à la main, en traversant le couloir, puis en montant l’escalier, jusqu’à la cheminée pour alimenter la flamme…
La fin de cet épisode, c’est le moment où je me rappelle d’Alain, avec une burette d’eau, entrain d’aller chercher les interstices des traverses goudronnées pour assurer d’avoir éteint les braises qui s’étaient formées à l’intérieur : je pense que la température que nous avions su former avec Vincent était effectivement proche d’un four de fonderie. En matière de « bêtises industrielles », Vincent c’était mon copain !!
Serions-nous allés jusqu’au bout de nos délires d’enfant : ce jour-là, peut-être, aurions-nous pu vraiment « Allumer le Feu » au 22, chemin des Tuileries.
Voilà, pourquoi, aussi, à chaque fois que j’entends la chanson de Johnny, j’ai une pensée pour Vincent, et ce fabuleux épisode de notre vie ensemble, enfants.
Après la vie, nous aura séparé, finalement assez jeunes…
Je le redis, il n’est pas normal de partir si tôt.
Vincent, repose en paix.
J’ai une pensée très émue et très sincère pour Toi et pour toute ta famille.
Guillaume, ton copain d'enfance