Très chère Maman,
Je me souviens de cette photo où nous sommes assises côté à côte chez Papi. Je te regarde avec ce sourire d’enfant heureux et excité d’être là et tu me regardes avec ce sourire plein de bienveillance…
Cette photo est à l’image de ce que tu as toujours été pour moi : l’amour doux et inconditionnel qui m’a enveloppé depuis que je suis née jusqu’à aujourd’hui et j’en suis sûre pour toujours.
Tu m’as enveloppée de tout ton amour et tu as tout fait pour que je puisse disposer de tous les meilleurs ingrédients pour que je sois en capacité d’accomplir ma mission de vie… Et je crois que pour partie, ta mission de vie était de nous chérir Annie et moi et de nous permettre de devenir les meilleures versions de nous-mêmes pour faire ce que nous avons à faire ici bas…
Tu as toujours marché à côté de moi et tu m’as aidée à me relever quand je trébuchais, tu m’as consolée quand je traversais des périodes difficiles… je trouvais chez toi et auprès de toi ce havre de paix où je pouvais venir me ré-ancrer et retrouver des forces, de l’énergie… tu étais toujours là, tes attentions de chaque instant étaient des cadeaux si précieux et je te promets que j’en ai dégusté chaque instant, chaque bouchée.
Tu n’as jamais jugé ce que j’ai fait. Tu m’as toujours soutenue, encouragée et même encore à l’hôpital quand j’expliquais à Jean-Paul ma nouvelle orientation professionnelle, tu semblais dormir mais non tu étais bien là et tu m’as dit « vas-y » et « fais-le ».
Alors que tu pars à ce carrefour de ma vie où je prends la décision de changer d’activité professionnelle, je ressens plus profondément cet héritage que tu as incarné et que tu as planté en nous, tes filles. Je perçois ton départ comme le signe que tu nous as accompagnées, Annie et moi, jusqu’ici exactement là où nous sommes maintenant ces versions de nous-mêmes capables et prêtes à choisir notre route et nous réaliser.
Je suis tombée sur une carte que tu m’as écrite pour le Noël 2017… elle m’a marquée car ton message était très différent des autres cartes… toi si pudique, tu m’écrivais ce que tu aimais chez moi : « Mon énergie débordante, ma sérénité et mon humeur constante. » Et je crois ne t’avoir jamais dit ou écrit ce que j’aime chez toi Maman : « J’admire ton courage, ta ténacité : quand petite tu passes en cachette l’examen d’entrée à l’école française de Saïgon alors que tu ne parlais ni ne comprenais le français; quand tu te fais réprimander à l’école par ton professeur de gym car tu n’as pas les bonnes chaussures mais comme tu ne veux pas demander de l’argent à ta Maman ou à tes soeurs, tu vas voir ton grand-père pour lui demander de te prêter des chaussures blanches qui sont trop grandes pour toi… J’admire ta capacité à avoir confiance en la vie et la vie te l’a si bien rendu : quand tu obtiens ce travail à l’hippodrome de Saïgon, quand tu deviens institutrice, quand alors que tu n’avais pas l’argent, les choses se sont mises en place pour que tu puisses avec Papa acheter ce terrain où vous avez bâti la maison à Saint Génies Bellevue.
Maman, ta vie c’est ton oeuvre à travers non pas ce que tu as fait… mais ce que tu as été… l’amour pour ceux que tu aimes et le don de soi qui ont guidé chacun de tes pas, chacun de tes gestes, chacune de tes décisions… à commencer par partir de ton pays loin de ta Maman, de ta famille, de tes amis pour suivre l’homme que tu aimes dans un pays inconnu.
Tu as tout réussi Maman… tu dois le savoir et tu peux partir en paix rejoindre les anges et les étoiles. Je sais que tu ne seras pas loin et que tu nous regarderas de là haut pour voir comment nous nous transformons à partir du terreau que tu nous as transmis et qui nous nourrit avec la même intensité qu’au premier jour…
Du fond de mon coeur je te remercie… pour tout ce que tu as été pour moi… ma Maman… et si tu vois des larmes sur mon visage… ne te méprends pas Maman… si je suis triste, je suis aussi heureuse car je sais que là où tu vas tu es attendue et aimée (ta Maman, ton Papa, ta soeur jumelle, tes grands parents… Papa…) et je sais que nous nous retrouverons un jour et que tu seras là pour me montrer le chemin avec ce même sourire que tu avais sur cette photo chez Papi….
Pars en paix.
Je T’aime…
Delphine.